Rencontre et regard sur la photographie documentaire
Alexis Vettoretti, photographe reporter basé à Paris, a su s’imposer comme une figure majeure de la photographie documentaire. Son travail, centré sur la rencontre avec l’autre, s’inscrit dans une volonté de capturer des instants de vie, de comprendre des réalités sociales et d’éclairer des zones d’ombre de notre société. Issu de la condition sociale ouvrière, la photographie était pour lui « un moyen de s’échapper ».
L’ancien étudiant en 3ème année d’Approfondissement Photographique à l’ETPA, il a remporté la Mention Spéciale du Grand Prix Photographie en 2013, marquant ainsi le début d’une carrière remarquable. Sa démarche photographique, profondément humaine, se caractérise par un processus d’« apprivoisement mutuel ». Pour lui, l’acte de prendre une photo n’est pas un geste isolé, mais un moment d’échange et de reconstruction de la relation à l’autre. « Rencontrer les gens dans un esprit d’ouverture et de dialogue » est, selon lui, la clé pour comprendre leurs vies, leurs choix, et leur situation.
Capturer la mémoire pour témoigner des réalités sociales
La série Tu es le Père débute lorsque pour un devoir à l’ETPA il doit illustrer une peur. A la même période, il apprend que son père est atteint d’un cancer. Cette approche photographique témoigne de leur lien : « Au lieu d’aller à la pêche, on prenait des photos ensemble « . Il explique alors que ce travail lui a permis de s’affirmer.
Aujourd’hui, Alexis Vettoretti continue d’explorer des projets personnels qui interrogent la société et la mémoire collective. Parmi ses projets les plus marquants figure la série Les Paysannes, un travail de plus de dix ans où il a photographié des agricultrices retraitées à travers la France. À l’aide de sa chambre photographique 4×5, il a su capturer les traces d’un monde paysan en transformation. Interviewé par TV5 Monde et France Bleu, il décrit « une population silencieuse« , ces femmes qui ont traversé des décennies de changements technologiques et sociétaux, des témoins essentielles pour comprendre les mutations profondes de la ruralité.
Il photographie spontanément alors ces dernières héritières d’un mode de vie qu’elles n’ont pas choisies, symboles d’une époque révolue de sacrifices et de résilience. Il rassemble ces 37 portraits de femmes et achève cette décennie de recueil de témoignages par un livre « Paysannes », publié chez Ulmer. L’une des figures emblématiques qu’Alexis Vettoretti a immortalisées est Geneviève Callerot, résistante et paysanne périgourdine, qu’il a rencontrée alors qu’elle avait 104 ans en frappant à sa porte. Ce portrait, capturé dans la simplicité d’un quotidien rural, résume à lui seul l’essence du travail du photographe : saisir l’histoire, la mémoire et l’humilité des individus. « Elle a tenu debout, fixant l’objectif avec un regard qui portait toute son histoire » explique-t-il.
Reconnaissance et impact d’un regard
Le parcours d’Alexis Vettoretti ne se limite pas à un seul projet : sa carrière est marquée par une série de reconnaissances qui soulignent son engagement à documenter des réalités sociales souvent marginalisées. En 2015, il a remporté le Coup de cœur de la Bourse du Talent Reportage, et en 2018, il a été distingué par le Coup de cœur du Prix Inframe/PhotoDoc. Ces prix sont le reflet de son processus de travail unique, qui place l’humain et ses récits au cœur de chaque image.
Au fil des années, Alexis Vettoretti a su explorer des univers variés grâce à la photographie sociale, interrogeant des pratiques sociales tout en évitant les a priori. Ses projets, aussi divers que poignants, témoignent de réalités souvent invisibles. Il a ainsi remporté de nombreuses distinctions, telles que le Prix UPP en 2022, le Prix Camera Clara – Mention Spéciale la même année, ou encore le Prix Roger Pic en 2021. Ces prix viennent récompenser la puissance et l’engagement de ses séries photographiques. À travers son travail, il nous invite à une réflexion sur notre époque, tout en rendant hommage à ceux qui, souvent oubliés, portent l’histoire de notre société.
Son parcours est un témoignage vivant de l’importance de la photographie comme outil de narration, de rencontre et de compréhension mutuelle. Pour Alexis Vettoretti, la photographie est plus qu’un art : c’est un acte de mémoire, de partage et de transmission.
